Avec un peu de retard, voici les textes que nous avons choisi. Nous voulons vous remercier de nous avoir envoyé vos textes, ce fut pour nous un plaisir de vous lire ! Alors continuez !! Le second défi est toujours ouvert !!
Pour le 1er thème, nous avions déjà notre idée, puis le dernier jour, nous recevons un texte et là, coup de coeur ! Ce texte est beau, bien écrit, nous avons aimé l'idée, bref, il était clair que c'était ce texte que nous allions publier.
Pour le 2ème thème, là pas d'hésitation. L'idée de ce texte est originale, inattendue même, et il respecte parfaitement la consigne donnée.
*1er thème Image - Texte de Thoma
Présentation: En ce qui me concerne, j'ai choisi le thème 1, celui de l'image, même si les deux thèmes m'inspiraient tout autant.
Pourquoi, question difficile !
Probablement parce que l'image évoque immanquablement le rêve, et un ailleurs qui m'inspirent. Peut-être aussi parce que j'avais déjà dans la tête cette histoire d'un être ailé attiré par le calme des forêts...
La Fille qui Rêvait Assise Sur un Morceau de Bois
Le vert émeraude des arbres a quelque chose de dangereusement attractif. De là où je suis, ces tâches aux couleurs chaudes sont des nuages cotonneux d’une texture unique. Quand on passe sa vie dans le ciel, il faut bien l’avouer, la seule chose qui nous attire, c’est le sol. Aller au-dessus des nuages pour nous, c’est aller au-dessous des arbres. Car au-dessus de la masse gris terne, il n’y a qu’un ciel bleu fade, si uni qu’il en devient ennuyeux. Le soleil, trop éblouissant, gêne et ne présente nul attrait. Le problème du ciel, c’est d’ailleurs ce vide ambiant, alors que le sol regorge d’une multitude unique. Ce que tout le monde recherche ici, c’est dépasser la frontière et explorer ce à quoi nous n’avons pas le droit d’accéder. Chez les Orontules, mon peuple, l’attirance et la peur pour cette terre interdite est la chose la mieux partagée. Nous avons peur car le sol est synonyme de mort. Le « sol » représente d’ailleurs le bruit de la chute, celui de l’atterrissage, celui du crash. Nous survolons la forêt de loin, rêvant de nous y aventurer, mais sachant pertinemment que les branches nous sont fatales. Nos ailes sont tellement fragiles – paradoxalement, elles sont notre point faible – bien que le reste du corps ne vaille pas beaucoup mieux. Nous sommes comme les particules d’air, je suppose, un rien nous envoie valser en miettes. Nous ne sommes même pas assez agiles pour esquiver ces épées aiguisées qui se dressent vers nous, tels des bras tendus. La moindre feuille devient épine. Alors nous survolons de loin. Parfois, je m’approche, comme les autres, mais nous sommes conscients du péril qui nous menace : les Alizans. Ils nous attaquent. Pourquoi ? Bonne question. La peur sans doute. Probablement le principal point commun entre nos deux peuples, le reste nous oppose. Quand leurs huppas (petites balles pourvues de piques en bois) émergent des arbres à une vitesse prodigieuse et mortelle pour nous déchirer les ailes, la crainte est pour nous. Nous ne les menaçons en rien, et même si nous le voulions, nous ne le pourrions pas, tellement nous sommes faibles. Et inconscients. Au point de nous approcher de l’infranchissable. Rien ne justifie cette curiosité malsaine, surtout pas les souvenirs que nous avons de ceux qui ont été trop intrépides ; car nous avons tous au moins une fois assisté à cet horrible spectacle – je devrais dire cauchemar - celui d’Orontules qui sombrent entre les arbres, les bruits d’ailes qui se froissent, les cris qui témoignent de la douleur atroce sur cette partie hypersensible, et l’impact des corps qui se fracassent contre les branches, les membres qui se brisent sous le choc et le léger bruissement des brindilles qui se détachent et tombent en pluie fine sur les feuilles. Ce qui me pousse à retourner sans cesse au plus près de la barrière de ce lieu de perdition, c’est un reflet de moi qui me hante si souvent, masquant la réalité par l’imaginaire. Ce reflet est là tout proche et pourtant si loin car il touche le sol. Mon reflet touche le solide, enfin, je me vois assise sur une branche confortable – je suis persuadée que ça existe – pouvant enfin lever les yeux plutôt que de les baisser pour contempler le plus splendide spectacle de la nature, pour me familiariser avec l’extraordinaire. Il me semble que chacun de nous a ce rêve idiot, ce désir caché d’accéder à l’impossible. C’est lié à ce fichu mythe : « Un jour, une créature sortira de la terre, jaillira d’à travers les arbres et viendra nous chercher pour nous amener en bas, au paradis. Il faudra être présent ce jour-là, il faudra être là, au-dessus des touffes soyeuses et meurtrières pour être choisi et précipité au-delà de l’interdit, vers la terre inconnue ». Beau songe, belle illusion. Je n’attends personne mais j’erre. Au mieux, ce sera une huppa qui surgira du sol, et c’est sûr que sous le coup, je descendrai.
Ce jour-là, je me suis vraiment approchée. Je distinguais les lignes sur les feuilles. Toutes les découpes de vert sur le magnifique fond noir. Toutes les nuances. Je cherchais à voir au plus loin. Mes yeux glissaient au plus bas. Mon œil avait traversé la frontière et je jouissais de cette légère transgression au plus haut point. Et je riais de joie et d’excitation. Jusqu’à ce que j’entende l’étrange sifflement. Il n’a rien d’horrible. C’est le bruit de la vitesse. Quand je suis hors de portée, j’aime même prendre le temps d’écouter ce son si particulier. En sachant qu’il nous menace de mort. La vitesse est ce qui manque aux Orontules. Voilà encore une chose qui nous fascine. Alors ce sifflement de la balle, ce frottement avec les particules d’air, ce chamboulement dans l’espace soulèvent notre admiration. J’évite la première huppa. Mais comme souvent dans ces cas-là, il y en a d’autres. Je m’éloigne un peu mais les projectiles me poursuivent. Ce sont les Alizans qui les lancent depuis en bas, et c’est impressionnant de voir comment ces petites balles se déplacent, le bruit de toutes les branches qui s’effritent sur leur passage, les feuilles qui s’écartent violement, cette force que rien n’arrête et qui traverse l’espace aussi rapidement. Une huppa arrive droit sur moi. Je peux encore l’éviter mais j’ai cette étrange seconde de doute. Si en fait la légende était vraie, comme elles peuvent toutes l’être selon l’interprétation qu’on en fait. Si donc, c’était les huppas qui nous guidaient vers le sol. Même si c’est à travers la douleur et la mort, c’est le moyen le plus « sûr » de descendre. C’est le chemin qu’on doit prendre. Plus ou moins consciemment, je laisse la huppa me frapper l’avant-bras. Crac ! Ses épines se plantent dans ma tendre chair et m’arrachent des filaments de peaux. Je sens chacune des morsures, le souffle de l’air sur ma chair à vif, et cette douleur résonne jusque dans mon crâne. Nous sommes fragiles, un rien nous blesse, nous assomme, nous déchire ou nous détruit. Mes ailes me lâchent et refusent de me porter. Et là, d’une certaine façon, je me mets à gagner en vitesse, devenant moi-même une huppa ; le vent siffle à mes oreilles, je suis le mouvement qu’on m’impose et je chute. J’ai l’image de l’impact des ailes de mes compagnons s’étant écrasés qui surgit, ces pans de peaux transparents lacérés, alors un instinct étrange, encore plus fort et plus inattendu que celui qui me pousse à étendre mes ailes pour voler et me retenir, pour lutter contre la gravité, un instinct plus subtil donc, me pousse à les fermer au contraire, à les coller contre mon corps pour être plus compacte, pour moins les abîmer. Je me recroqueville alors en boule, inspirée par mon nouveau « guide » et je sombre entre les arbres. J’entends les cris de mes compagnons puis la douleur de chaque coup me fait perdre conscience de tout cela. Ce qui n’est qu’une éraflure me transperce les membres ; mais, en imitant les huppas, je protège mes parties vitales, et mon poids me permet presque de m’imposer face aux branches. Je n’ai jamais volé aussi vite que je m’écrase à présent. Puis je ralentis à nouveau. Le feuillage très épais me retient, les larges branches me font rebondir, et contrairement à toute attente, j’atterris sur un tapis de mousse, meurtrie mais vivante. Je sombre aussitôt dans une inconscience aussi profonde que l’obscurité ambiante.
J’émerge, incapable de réfléchir. Mon visage est tout humide, mes ailes me font atrocement souffrir et alors que je regarde devant moi j’aperçois un bout de celles-ci qui visiblement n’est pas à sa place. Certains pans ne semblent être retenus que par une fine membrane, et je sais que les cris ne suffiraient pas à traduire la souffrance de ces déchirures. Mon dos et mes bras me lancent d’une douleur indescriptible. Je suis dans un monde où les mots ne suffisent plus pour le dire. Le domaine de l’inconnu où le regard est neuf et sans parole. Car comment dire ce qui ne fait que commencer à exister à nos yeux. Quels mots trouver et donner ? Je suis trempe et un coup d’œil suffit à me faire comprendre qu’il s’agit de mon sang gris perle qui m’échappe, pâle phosphorescence dans ce lieu sombre. La clarté m’abandonne, la vie même peut-être. Je pose ma joue sur la mousse. Petit à petit, cela m’apaise, alors, pour tenter de me protéger et de survivre, je détache de gros morceaux de mousse et me recouvre avec. Ce contact tiède me soulage. J’aperçois aussi une sorte de liquide transparent, près de ma tête. Mise en confiance par cette couleur familière, je m’approche de plus près et y mets la langue. C’est… bon. J’en avale un peu puis m’endort, cassée. Combien de temps ai-je dormi ? Difficile à dire. Mon corps est tout engourdi mais il semble que je ne saigne plus. J’ai toujours mal. J’entends des cris. Des sons graves et mélodieux, si différents de nos voix aigues. Ces sons m’enveloppent agréablement, même si je ressens ce qu’il y a d’inamical derrière. Je reste cachée et je fais bien. Ils me cherchent, je crois. Heureusement, la mousse me garde, à l’abri des regards.
Nouveau réveil. Seule. Je m’étire, le plus délicatement possible, en évitant de toucher les parties les plus sensibles. J’écarte la mousse, puis péniblement, je me soulève. Je goûte à nouveau au liquide transparent qui s’étale en formes irrégulières sur le sol. C’est frais et cela me rappelle la pluie en mille fois plus fort quand ça coule le long de la gorge. Et puis, lentement, je commence à explorer ce qu’il y a autour de moi. Une véritable caverne d’Ali Baba apparaît à mesure que mes yeux s’adaptent aux ténèbres ambiantes. Il y a beaucoup de choses étranges que je porte à ma bouche pour voir en quelque sorte, pour ressentir pleinement ce qui m’entoure. Malgré la douleur qui me poursuit, une joie immense ne peut s’empêcher de me submerger.
J’ai erré plusieurs jours comme ça, épouvantée, meurtrie et émerveillée. Comme je ne sais pas me servir de mes jambes, mes ailes m’ont encombré plus qu’autre chose dans cet enchevêtrement de bois. J’ai rampé et me suis cognée souvent. J’en ai pris l’habitude. Puis un jour, insouciante selon ma nature, j’ai dû affronter le pire de l’inconnu. L’autre. Alors que je contemplais la mousse en forme d’étoiles qui formait un tapis de velours à mes pieds, j’ai relevé la tête, alertée par un bruit, et j’ai vu un Alizan. De près, de trop près. Plutôt que d’être seulement lente, je me suis totalement paralysée. Je décidai ainsi de mettre toutes les chances de mon côté. Lui aussi était immobile, mais il n’y avait nulle peur dans son regard. Ils ont l’habitude de nous tuer, je le sais bien. Je ne suis qu’une Orontule incapable de lutter. Il est un Alizan, qui ne m’a pas tué. Il a pansé mes blessures au contraire. Il a passé des heures à contempler mes ailes, à les admirer malgré la destruction irrévocable qui s’est opérée. Il m’a appris à survivre et à connaître ce magnifique royaume que son peuple nomme la forêt ; nous avons appris à communiquer ensemble. Il est différent des siens, qui eux, ne m’auraient pas épargné. Il me protège. Je pense, aussi incroyable que cela puisse paraître, qu’il est intrigué par ce que je suis, mon air pataud, ma lenteur, ma fragilité, ma façon d’appréhender le monde, mes sensations, si différentes des siennes. Je crois n’être rien d’autre que d’ordinaire par rapport à lui et sa force, sa rapidité, son agilité et sa connaissance du monde. Pourtant, il ne sait pas grand-chose de mon monde puisque j’apprends que les Alizans sont persuadés que nous sommes responsables des catastrophes qui les accablent fréquemment, des maux venant du ciel comme châtiment divin. Ils nous prennent pour des dieux qu’ils veulent abattre.
A une période, il a voulu m’aider à regagner le ciel en recollant les lambeaux qui pendent dans mon dos. C’était inutile et vain, je ne le souhaitais pas. Je voulais pouvoir continuer à regarder le ciel, sous les feuilles qui tombent en de merveilleuses couleurs qui n’appartiennent qu’à la forêt, sous les branches nues qui dessinent leur toile contre le ciel, sous les bourgeons qui éclatent à chaque nœud de chaque arbre, sous le chapiteau vert qui abrite de l’agressif soleil et de la pluie, irritante pour ma peau fragile.
Je sens alors des gouttes sur ma joue. Je sors du rêve. Je souris car c’était un songe magnifique. Un songe qui m’apprend à aimer ce que j’ai, et à ne plus courir derrière ce que je n’aurai jamais. Un songe où plutôt que de me chercher des ailes pour enfin accéder au firmament, je les détruis, leur préférant le fait de ramper pour simplement apprendre à vivre en gardant les pieds sur terre.
* 2ème thème Citation - Texte de Céline
Présentation: J'ai choisi le thème numéro 2, mais j'ai choisi de faire un texte sans rapport avec Twilight (car je ne connais pas anyway). Malgré tout, je suis restée dans l'univers puisque mon personnage féminin, Camille, est un loup garou. Amoureuse d'un humain. C'est une courte nouvelle sur leur histoire.
Il la regardait, impuissant. Il savait. Que ce soir était le soir. Que ce soir était son dernier soir. Que ces instants volés s’envoleraient a jamais. Il ne savait quoi dire. Quoi faire. La serrer dans ses bras. L’embrasser. Lui faire l’amour. Ou bien, tout ça. Dans cet ordre.
« Je peux combattre les nuages. Pas une éclipse » annoncait-il a sa belle, signifiant qu’il avait beau remuer ciel et terre pour elle, cette éclipse lui serait fatale, quoi qu’il en soit.
« Je sais. Je sais. » Elle mit ses deux mains autour du visage de Gabriel. « Je te le reproche pas. Je ne te reproche rien. » Et comme pour appuyer ses mots, elle l’embrassa tendrement.
Leur rencontre, Gabriel ne pouvait l’oublier. Elle avait eu lieu, par un matin de septembre, dans le cimetière Notre Dame. Gabriel, comme chaque année, se rendait sur la tombe de sa mère, décédée 7 ans plus tôt. Au début, son père l’y accompagnait. Par la suite, Gabriel souhaita s’y rendre seul. Pour ne pas montrer les larmes qui l’envahissaient. Pour ne pas montrer à quel point il souffrait de cette absence aussi. Comme à son habitude, il racontait sa vie, accoté contre la pierre tombale. Après une heure de monologue, il regagnait tranquillement la sortie lorsqu’il aperçut quelque chose. Quelqu’un peut-être. Il s’approchait, méfiant. Lorsqu’il comprit qu’il s’agissait d’un corps, de sexe féminin, nu, étendu sur le sol du cimetière, il ne sut comment réagir. Était-elle morte, avait-elle été violée… Il s’approchait. La jeune femme respirait mais sans plus. Gabriel retira sa veste pour la poser sur le corps dénudée et la porta jusqu'à son auto. A cet instant, il avait deux choix. Son appartement. Mais pour quelle raison ? L’hôpital, valeur sure.
Lorsqu’elle se réveilla deux heures plus tard, dans un lit qui n’était clairement pas le sien, Camille ne savait comment réagir. C’est alors que Gabriel entra dans la chambre, petit déjeuner en main.
« Qui etes-vous ? Où suis-je ? M’avez-vous kidnappée ? »
« Hey, on se calme jeune fille. Moi aussi j’aimerasi vraiment savoir qui tu es. Et pourquoi je t’ai retrouvé nue, dans un cimetière, à 7h du matin. Mais pour te répondre, moi c’est Gabriel. Tu es chez moi, c’est-à-dire, dans Westmount. »
« Dans ce cas, j’vous remercie beaucoup de vous être occupé de moi. Très aimable. Mais je dois rentrer. »
Alors qu’elle voulait quitter le lit, elle n’osa pas. Pudeur oblige.
« Je ne quitterai pas la pièce tant que tu ne m’auras pas dit le fin mot de l’histoire » annonçait fièrement Gabriel.
« Je… Mes parents vont freaker. Je dois filer. »
« Je t’en prie. Avec quels vêtements ?? J’aurais aimé les emporter, mais il n’y avait aucune trace d’eux. Même pas une petite culotte… » continuait Gabriel, joueur.
« Est-ce que je pourrais t’emprunter quelques affaires. Je te les rendrai, je te jure… »
« Avec plaisir… une fois que tu m’auras raconté ta folle soirée »
« Je m’en souviens plus » déclara Camille, alors que Gabriel était conscient de son mensonge, sourire aux lèvres.
« Je peux pas t’en parler. Je peux pas en parler. Regarde. C’est rien contre toi. C’est juste une réalité. J’veux partir, MAINTENANT »
Gabriel sortit plusieurs affaires de sa garde-robe et quitta la chambre.
Lorsqu’elle rejoignit le salon, elle décida d’être plus agréable. Surtout que le jeune homme avait un charme fou. Une beauté pure. Sensuelle.
« Je suis désolée. Je suis très impolie. Merci. Merci beaucoup d’avoir fait tout ça pour moi. Je ne sais pas trop comment te remercier. »
Affectueusement, elle posa sa main droite sur la joue de Gabriel. Qui posa sa main gauche sur les hanches de Camille et l’embrassa fougueusement.
En quelques instants, les deux inconnus devinrent amants.
Gabriel avait longtemps insisté pour la revoir. Camille avait longuement hésité. C’était dangereux. Pour lui. Un peu pour elle. Mais son attirance pour lui était trop forte.
Elle souhaitait cependant y aller en douceur. Gabriel trouvait cela étrange. Non pas le fait d’y aller en douceur, mais de ne jamais se voir le soir. De ne jamais passer une nuit dans les bras l’un de l’autre. Ils se voyaient dans un café entre deux cours, et finissaient inlassablement dans le lit de Gabriel. Amants passionnés, jeune homme amoureux, jeune fille indécise.
Après trois mois de passion ardente, Camille était incapable de se passer de son beau. Elle décida donc d’être honnête envers lui. Lui expliquer cette vérité improbable, légendaire. En priant pour que sa réaction soit celle attendue.
« Tu te souviens de ce matin, au cimetière. La ou tout a commencé…. »
« Vas-tu enfin me donner une explication ?! » demandait Gabriel.
« Oui. S’il te plait, écoute moi. Jusqu’au bout. Ne m’interromps pas. Tout cela va te sembler irréel. Mais c’est ma réalité. Je… -long silence-
Je… Il y a plusieurs années, j’ai été mordue. Par un loup. J’en suis morte. Si je puis dire. Et je suis revenue d’entre les morts. Je ne suis plus humaine a 100 %. Je… Disons que chaque nuit, je me transforme. Et ce soir la, c’est ce qu’il s’est passé. Je ne me rappelle pas de chaque détail. Juste de cette attaque venant d’un autre loup garou. Nous nous sommes battus. Et visiblement, il s’en est sorti mieux que moi. Je sais pas quoi te dire. J’aimerais te dire que tout va bien, ce n’est rien, que ça ne change rien. Mais ce n’est pas le cas. J’aurais aimé t’en parler avant mais j’avais besoin de sentir ta confiance en moi. J’aurais aimé ne pas t’embarquer la dedans mais je suis folle de toi. Et si tu pars, maintenant, j’vais peut-être pas m’en relever. Mais je le comprendrais. »
Gabriel ne bougea pas.
« Pourquoi est-ce que tu es toujours la ?? » s’exclamait Camille, en larmes.
« Parce que je t’aime. J’ai déjà perdu la femme de ma vie, en l’occurrence, ma mère, je ne veux pas perdre la seconde »
A ces mots, Camille se leva immédiatement de sa chaise et se précipita dans ses bras.
Des lors, les deux amoureux ne se quittèrent plus. Ou presque. Malgré la confiance absolue en Gabriel, Camille refusait de se montrer telle qu’elle était, devant son amant.
Lorsque les météorologistes annoncèrent une éclipse totale dans 2 ans, Camille préférait penser que c’était une légende. Que le pire n’aurait pas lieu. Que cela était impossible, improbable, impensable. Alors, elle mit toute son énergie à oublier. Oublier ce détail qui risquait de lui gâcher ses 2 prochaines années. Les dernières ? Non, ceci est un mythe.
Et lorsqu’on lui confirma, plusieurs mois plus tard, que la légende était bien ancrée dans la réalité, elle décida d’être honnête avec Gabriel. Elle lui devait bien ça. Après tout ce qu’il avait accepté, supporté, pour elle, par amour. Elle lui devait.
Ce qu’ils firent. Jusqu'à aujourd’hui.
Car aujourd’hui était un autre jour. Aujourd’hui était le dernier jour.
« Ne pleure plus. Sans toi, ma vie n’aurait jamais été aussi belle. Sans toi, je n’aurais jamais été aussi heureuse. Promets-moi. Promets-moi de passer a autre chose. Prends le temps qu’il faudra. Mais oublie moi. Tu mérites d’avoir une vie au delà de tes attentes. Je veux être fière de toi. Vu d’en haut. »
Gabriel ne sait quoi répondre. Les mots ne sortent pas. Le cœur est lourd. Le poids de ses mots également.
Après une dernière étreinte, Camille décide qu’il est temps. Pour elle de partir. Pour eux, de se quitter. Elle ne veut pas qu’il reste. Elle a toujours refusé qu’il la voit en loup garou et elle aimerait qu’il en reste ainsi.
Il se tourne et commence à marcher en direction de la sortie.
Elle s’écroule a terre. En larmes.
Il se retourne un instant, quelques secondes suffisent dans leurs regards, lourd de sens.
Il quitte le cimetière. C’est la fin.
Le soleil vient de se coucher. La nuit approche. C’est la fin.
Ils décidèrent de profiter pleinement de chaque opportunité.